Les Femmes autochtones discutent et élaborent des stratégies pour avancer la mise en œuvre de la RG39

17 avril 2023.- Lors d’un événement parallèle à la 22e session de l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones (UNPFII) au siège des Nations Unies à New York, Indigenous Peoples Rights International (IPRI), le Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les Peuples autochtones, l’Inuit Circumpolar Council (ICC), The Christensen Fund, The Institute for the Study of Human Rights de l’Université Columbia, le Forum autochtone Abya Yala, et le Forum international des Femmes autochtones (FIMI) se sont réunis pour continuer à promouvoir la mise en œuvre de la Recommandation générale numéro 39 (RG39) de la CEDEF, une réalisation historique pour les Filles et les Femmes autochtones du monde entier, compte tenu des multiples formes de discrimination auxquelles nous sommes confrontées.

L’UNPFII est un organe consultatif qui promeut le respect et la pleine application de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des Peuples autochtones. En cette occasion, il a joué un rôle clé en tant que pont entre institutions internationales, les agences des Nations Unies et les organisations autochtones, afin de continuer à avancer dans la mise en œuvre de la RG39, un instrument relatif aux droits de la personne, juridiquement contraignant, qui tient compte des différentes dimensions de la discrimination subie par les Femmes autochtones, en tant que femmes et en tant que membres des Peuples autochtones.

En début de réunion, Joan Carling, militante Kankana-ey Igorot des Philippines et directrice générale de l’IPRI, a expliqué que la Recommandation porte sur les droits individuels et collectifs des Femmes autochtones, « en particulier sur les problèmes et les préoccupations des Femmes autochtones défenseures, et reconnaît les risques et les différentes formes d’agressions auxquelles elles s’exposent dans l’exercice de leurs activités de subsistance relatives à l’accès et au contrôle de leurs terres et ressources naturelles ». La mise en œuvre, a-t-elle ajouté, est importante en ce qu’elle appelle les États à garantir que les défenseures ne soient pas visées par des représailles ou criminalisées pour leur travail.

La présidente du FIMI, Tarcila Rivera Zea, femme quechua du Pérou, a assuré que l’implantation de la Recommandation implique de grands défis : « nous devons faire comprendre à nos propres organisations que la mise en œuvre ne profite pas seulement aux filles et aux femmes, mais que les Peuples autochtones doivent l’utiliser pour impulser une politique nationale au service direct des collectivités ».

Dans son discours, la leader Arhuaca Leonor Zalabata Torres, ambassadrice de Colombie auprès des Nations Unies, a affirmé que « la participation sociale aux décisions des États joue un rôle important pour la paix, le développement durable de la terre, et la fraternité et la solidarité des peuples ». La Recommandation numéro 39 de la CEDEF, a-t-elle ajouté, « nous permet de décider comment nous voulons vivre nos cultures, selon le principe du consensus et de manière cohérente avec nos réalités ». Les Femmes autochtones « ont joué un rôle important à cet égard parce que nous avons été en mesure de préserver la sagesse ancestrale et, avec elle, la permanence que nous avons en tant que Premières Nations ».

Gladys Acosta, ancienne présidente du comité de la CEDEF, a commenté qu’« à l’heure où les forces de la mort semblent vouloir s’imposer, la RG39 représente une vaste réflexion sur les forces de la vie et leur prévalence ». Ce que nous avons accompli avec la Recommandation, main dans la main avec les organisations et les Femmes autochtones, a-t-elle assuré, « c’est de recueillir respectueusement la vision du monde, la spiritualité des peuples et de reconnaître le lien profond entre leurs droits, les territoires et les ressources naturelles de la communautés ». La Recommandation générale numéro 39 « est un instrument de lutte », a-t-elle souligné.

En outre, « elle insiste sur l’obligation des États parties de garantir l’accès à l’éducation, à la santé et à la participation politique à l’intérieur comme à l’extérieur des communautés, et exhorte les États à prendre des mesures contre les violences de genre, y compris celles perpétrées par les forces publiques ou parapubliques », a-t-elle conclu.

Nukila Evanty, directrice générale du Women Working Group (WWG) et Rosalee González, coordinatrice de la région nord de l’Enlace Continental de Mujeres Indígenas de las Américas (ECMIA), ont convenu que le racisme structurel aggravé par la discrimination fondée sur le genre continue d’être un fait du quotidien pour les Filles et les Femmes autochtones du monde. La RG39 « répond à un appel permanent des Premières Nations à créer un instrument spécifique pour promouvoir et protéger nos droits, et représente une lutte croissante pour une plus grande inclusion tout en préservant l’identité culturelle de nos peuples », a déclaré González.

La Sous-Secrétaire générale des Nations Unies et Directrice exécutive adjointe d’ONU Femmes, Åsa Regnér, a reconnu la grande importance des alliances que les organisations et Femmes autochtones ont établies pour parvenir à cette recommandation stratégique, ajoutant qu’il était important de continuer, tous et toutes, à travailler à sa mise en œuvre. « Il est prouvé que les Filles et les Femmes autochtones sont trois fois plus susceptibles de subir des violences que celles qui ne sont pas autochtones. Des défenseures autochtones sont même tuées pour chercher à protéger les droits d’autres femmes, et ces attaques n’arrivent pas à la une des journaux. » Les actions que nous promouvons, a-t-elle ajouté, doivent contribuer à rendre visibles les violences réellement vécues.

Sara Olsvig, présidente internationale du Inuit Circumpolar Council (ICC), a évoqué la période où le gouvernement danois avait forcé l’implantation de contraceptifs sur les femmes dans le but de réduire le taux de natalité au Groenland. « Entre 1966 et 1975, quelque 4 500 filles et femmes inuites ont reçu un dispositif intra-utérin (DIU), souvent à leur insu », a-t-elle expliqué. Ce projet de planification familiale forcée a porté atteinte à la santé des femmes, qui ont pendant plusieurs années après souffert de douleurs, d’infections et de difficultés de grossesse. « La recommandation que nous avons entre les mains peut nous aider à faire en sorte que de si honteuses violations sur le corps de femmes ne se reproduisent plus jamais », a-t-elle déclaré.

Pour clore la rencontre, Puyr Tembé, présidente de la Federação Estadual dos Povos Indígenas do Pará (FEPIPA), a expliqué que l’organisation des Femmes autochtones au Brésil est relativement récente, mais que « nous avons réussi à renforcer et à multiplier nos voix en occupant des espaces institutionnels qui nous aident à créer des politiques publiques mieux alignées avec nos besoins et nos intérêts ».

« Au sein du gouvernement, nous avons fait des progrès significatifs pour la reconnaissance formelle de nos droits, et la Recommandation générale numéro 39 est un outil pertinent qui reconnaît les Femmes autochtones comme agents de changement, à l’intérieur comme à l’extérieur de nos communautés, et nous permet de jouir du plein exercice de nos droits politiques », a-t-elle conclu.

Les femmes inuites de l’Arctique conçoivent des stratégies de collaboration entre les organisations autochtones et l’ONU pour la mise en œuvre de la Recommandation générale n° 39 de la CEDEF

20 avril 2023.- Pour renforcer le mouvement des femmes inuites dans l’Arctique et maintenir un dialogue sur la mise en œuvre de la Recommandation générale numéro 39 (RG39) de la CEDEF, nous nous sommes réunies lors d’un événement parallèle à la 22e session de l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones (UNPFII). L’événement, organisé par l’Inuit Circumpolar Council (ICC), la Mission permanente du Danemark à New York et le Forum international des Femmes autochtones (FIMI), avait pour but de promouvoir l’application de cet instrument international contraignant à travers lequel les États sont tenus de protéger les droits individuels et collectifs des Filles et des Femmes autochtones dans le monde.

Ouvrant le dialogue, Binota Moy Dhamai, président du Mécanisme d’experts sur les droits des Peuples autochtones (2022-2023), un organe subsidiaire du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, a expliqué que la RG39, adoptée grâce au travail acharné des mouvements de Femmes autochtones, reconnaît les voix des filles, des jeunes et des femmes en tant qu’agents de changement et leaders à l’intérieur comme à l’extérieur de leurs communautés.

« La Recommandation générale définit et adresse les différentes formes de discrimination intersectionnelle auxquelles elles sont confrontées, mais rend également obligatoire l’accès à la justice », a déclaré Moy Dhamai. « Elles ont travaillé d’arrache-pied pour les femmes et les filles inuites, afin que les actions du gouvernement danois pour implanter des dispositifs contraceptifs pour réduire le taux de natalité au Groenland, dans les années 1960 et 1970, ne se reproduisent plus », a-t-il déclaré.

Dans son discours, Tarcila Rivera Zea, présidente du FIMI, a donné une brève introduction à la RG39. Elle a rappelé que, depuis 30 ans, différentes organisations de Femmes autochtones se sont articulées en un réseau continental pour protéger leurs droits. « Nous avions de nombreux instruments internationaux qui travaillaient pour garantir l’égalité entre femmes et hommes, mais il manquait une pierre angulaire qui traiterait spécifiquement de la protection des droits des Filles et des Femmes autochtones », a-t-elle déclaré.

Rivera Zea a reconnu que la mise en œuvre de la RG39 représente un défi. « L’objectif de la Recommandation est d’orienter les États quant aux mesures législatives, politiques et autres mesures pertinentes à prendre pour garantir le respect de leurs obligations relatives aux droits des Filles et des Femmes autochtones. Nous devons renforcer la négociation entre les gouvernements nationaux et les acteurs internationaux. Il faut parler de la mise en œuvre pour que la recommandation se fraie un chemin de la scène internationale au niveau local, et ainsi combattre la corruption pour renforcer la protection des droits et l’accès à la justice », a-t-elle expliqué.

La présidente de Pauktuutit Inuit Women of Canada, Gerri Sharpe, s’est dite reconnaissante pour le dialogue qui s’est établi à partir de cette rencontre entre les représentants d’organisations internationales et les femmes inuites qui vivent dans les différentes régions arctiques de la planète.

« Nous nous engageons à faire en sorte que les droits humains et les priorités des femmes inuites soient équitablement inclus dans le Plan d’action sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des Peuples autochtones, que le gouvernement fédéral canadien élabore actuellement en partenariat avec des organisations autochtones », a déclaré Sharpe. La RG39 sera un excellent outil de travail collaboratif avec les différentes collectivités territoriales, a-t-elle ajouté.

Tove Søvndal Gant, membre de l’UNPFII, a reconnu qu’il existe des inégalités, des violences structurelles et des taux de corruption alarmants dans certains des pays qui ont ratifié leur participation aux programmes de protection des femmes. « La volonté politique des fonctionnaires de chaque pays sera essentielle pour adapter la Recommandation aux circonstances locales et éviter toute malhonnêteté qui pourrait mettre en péril sa pleine application », a-t-elle déclaré.

Elle a aussi ajouté que « les gouvernements du Danemark et du Groenland devraient renforcer leur coopération politique et veiller à ce que le document soit traduit dans les langues autochtones correspondantes, afin que les habitants puissent le comprendre ».

Enfin, parlant de comment concevoir des stratégies de collaboration entre les organisations autochtones et l’ONU pour favoriser la mise en œuvre de la RG39, Rosalee Gonzalez, co-coordonnatrice de la région nord de l’Enlace Continental de Mujeres Indígenas de las Américas (ECMIA), a expliqué que le plus important était de continuer à renforcer la participation politique et citoyenne des Femmes autochtones à l’Assemblée générale.

« Nous devons former des Femmes autochtones à l’ONU afin de devenir hautement qualifiées et ainsi nous assurer d’avoir des experts au Haut-Commissariat qui connaissent nos besoins et les enjeux qui nous touchent à l’intérieur comme à l’extérieur des territoires autochtones », a-t-elle déclaré. 

Les femmes leaders, a-t-elle ajouté, jouent un rôle très important dans le suivi et la supervision des actions prises par les gouvernements pour garantir une mise en œuvre efficace. En outre, ces femmes membres des organisations de la société civile peuvent présenter des rapports parallèles aux comités afin de mettre en lumière des lacunes et des défis à surmonter dans l’application de la Recommandation qui ne sont peut-être pas mentionnés dans les rapports officiels présentés par les États.

Les Femmes autochtones exigent une mise en œuvre effective de la Recommandation générale 39 de la CEDEF et l’avènement d’une ère numérique culturellement pertinente où l’égalité des genres est une réalité

Le 6 mars 2023 – Afin de garantir que les principes d’inclusion et d’intersectionnalité guident l’innovation technologique et de réduire la discrimination et les inégalités de genre, le Forum international des Femmes autochtones (FIMI) a organisé une réunion de coordination des Femmes autochtones en parallèle à la 67e séance de la Commission de la condition de la femme (CSW67) de l’ONU.

La CSW67 est le principal organe international consacré exclusivement à la promotion de l’égalité des genres et à l’élaboration de normes internationales qui favorisent le renforcement du pouvoir des femmes. Cette année, elle sera également un espace fondamental pour amplifier nos voix et notre lutte pour la mise en œuvre effective de la Recommandation générale numéro 39 (RG39) de la CEDEF, un instrument international contraignant pour la protection des droits individuels et collectifs des Femmes et Filles autochtones à travers le monde.

Lors de l’événement, des femmes leaders de différentes régions se sont réunies pour réfléchir à nos objectifs, réalisations, lacunes et défis en matière de promotion et de protection de nos droits. Nous avons discuté de l’obligation assumée par les États parties d’élaborer et de mettre en œuvre des politiques intégrales qui protègent de manière effective les droits et les principes d’égalité substantielle et de non-discrimination. Nous avons convenu de l’importance cruciale de la participation des Femmes et Filles autochtones à la construction d’une ère numérique pouvant réduire les écarts de genre et favoriser des écosystèmes d’innovation technologique inclusifs pour l’élimination des violences.

La réunion a commencé par une cérémonie spirituelle dirigée par Malia Nobrega-Olivera, Femme autochtone de la vallée de Hanapēpē, Kona, Kaua’i à Hawaï, directrice des partenariats stratégiques et de la participation communautaire de l’École des connaissances hawaïennes, ainsi que du programme Loli Aniau, Makaala Aniau (LAMA).

Dans son allocution, Tarcila Rivera Zea, femme Quechua du Pérou et présidente du FIMI, a prononcé de chaleureuses paroles de bienvenue et a rappelé que le Forum international des Femmes autochtones, composé d’organisations de sept régions socioculturelles, avait ses origines dans les réunions tenues en 1995 lors de la signature de la Déclaration de Beijing des Femmes autochtones, qui « jetait les bases de nos revendications en tant qu’autochtones et en tant que femmes ».

Aujourd’hui, près de 30 ans plus tard, les articles avec lesquels nous avions alors « défini nos droits et nos positions en tant que Femmes autochtones sont plus pertinents que jamais pour récupérer, partager, réfléchir et continuer à projeter nos aspirations sur la scène internationale », a souligné Tarcila Rivera Zea.

Dans une vidéo diffusée lors de l’événement, Lucy Mulenkei, femme Masai du Kenya, cofondatrice et vice-présidente du FIMI, a déclaré que l’importance de la réunion résidait dans le fait que « nous écouterons des voix diverses qui nourriront notre expérience de travail sur des questions qui ont un impact sur les Femmes autochtones et les Peuples autochtones en général ».

Teresa Zapeta Mendoza, Maya K’iche du Guatemala et directrice du FIMI, a reconnu l’importance des alliances stratégiques qui se sont formées au fil du temps pour atteindre des objectifs historiques communs entre Femmes autochtones de différentes régions, malgré les violences et les inégalités. « Cette année, en plus de réfléchir ensemble aux défis que nous rencontrons en cette ère numérique pour parvenir à l’égalité des genres et au renforcement du pouvoir de toutes les femmes et filles, nous célébrons également l’approbation de la RG39, qui nous sert de pont pour garantir nos droits ».

« La Recommandation générale représente un événement historique qui ne favorise pas seulement les Femmes et Filles autochtones, mais aussi les droits fondamentaux des Peuples autochtones du monde entier », a-t-elle insisté.

Les participantes ont reconnu que les gouvernements doivent assumer leurs responsabilités et engagements dans la lutte contre les violences, formulant certaines demandes et actions à prendre pour avancer avec la société civile et d’autres acteurs clés dans la mise en place de solutions technologiques pour l’autonomisation et la transformation des rôles et des normes sociales traditionnelles : promouvoir l’accès des Femmes autochtones aux technologies numériques dans les zones rurales et non rurales pour réduire les inégalités; renforcer, grâce à l’éducation numérique, notre identité en tant que femmes appartenant à des Peuples autochtones; éliminer les inégalités technologiques pour garantir les droits des Femmes et Filles autochtones handicapées en leur permettant de connaître les instruments internationaux qui les protègent; comprendre que l’installation d’une infrastructure numérique, en particulier en milieu rural, n’est pas la solution pour assurer la connectivité de toutes, car il est nécessaire de comprendre les autres obstacles qui limitent l’utilisation des technologies par les femmes et de générer des stratégies d’adoption et d’utilisation à proximité des utilisatrices et de leurs communautés; générer et promouvoir l’accès à l’information sur la violence numérique ou les crimes cybernétiques contre les jeunes et les Femmes autochtones.

Enfin, Teresa a réitéré que l’articulation des femmes a été fondamentale pour l’adoption de la Recommandation générale 39 de la CEDEF, assurant qu’il s’agit d’une occasion unique d’intégrer les priorités collectives, la vision du monde, les expériences et les leçons partagées par les Femmes autochtones afin de générer un changement réel et garantir la préservation de nos différentes cultures et de nos identités individuelles et collectives.

Les Femmes autochtones ouvrent un dialogue stratégique à la CSW67 entreles parties prenantes, les mécanismes des Nations Unies et la communauté debailleurs de fonds pour assurer une mise en œuvre effective de la RG39 de laCEDEF

10 mars 2023 – Dans le but de renforcer le mouvement des Femmes autochtones et de convenir d’un programme de plaidoyer international entre les parties prenantes, les États membres, les personnes alliées et les mécanismes des Nations Unies pour la mise en œuvre effective de la Recommandation générale 39 (RG39) de la CEDEF, qui protège les droits individuels et collectifs des Filles et des Femmes autochtones, le Forum international des Femmes autochtones (FIMI) et la branche des Peuples autochtones et du développement du Secrétariat de l’Instance permanente sur les questions autochtones (IPDB/SPFII) ont tenu un dialogue stratégique afin d’élargir la diffusion de la recommandation et de définir et accélérer les prochaines étapes pour assurer son application dans le monde entier.

L’événement, organisé dans le cadre de la 67e séance de la Commission de la condition de la femme (CSW67) de l’ONU, a réuni des dirigeantes autochtones de réseaux régionaux d’Asie, d’Afrique, des Amériques, de l’Arctique et du Pacifique, des délégations gouvernementales et des bailleurs de fonds dans le but de discuter des progrès et des lacunes dans la mise en œuvre de la RG39, et de tout ce que celle-ci représente pour contrer toutes les formes de discrimination contre les Femmes et les Filles autochtones.

Pour marquer le début de la rencontre, Tarcila Rivera Zea, Quechua du Pérou et présidente du FIMI, a affirmé que le principal défi pour la mise en œuvre de la Recommandation était de faire en sorte que les États membres créent des politiques publiques qui contribuent au renforcement du pouvoir individuel et collectif des Femmes et Filles autochtones partout dans le monde. « La mise en œuvre ne sera pas facile. Nous avons mené un travail acharné ancré dans la solidarité aux niveaux local, régional et international, touchant l’esprit et le cœur des décideurs clés pour parvenir à protéger les droits des femmes et des filles », a-t-elle déclaré.

La sénatrice Malarndirri McCarthy, vice-ministre de la Santé autochtone dans le Territoire du Nord de l’Australie, a admis avoir vécu les violences de première main en tant que femme. « Les Peuples autochtones, et en particulier les femmes, doivent être inclus à tous les niveaux du processus décisionnel afin d’y intégrer leurs forces, leurs connaissances et leurs identités culturelles. »

Elle a expliqué qu’en Australie, la mise en œuvre de la RG39 se fera « à travers la création d’un organe consultatif permanent, qui conseillera le Parlement sur les questions impactant ce secteur. Nous travaillerons en partenariat avec les acteurs politiques et la communauté de bailleurs de fonds pour atteindre les objectifs

économiques, sociaux et de réformes prioritaires dans le cadre de notre accord national visant à combler les écarts. Les autorités sont déterminées à faire en sorte que le Parlement australien travaille avec les peuples des Premières nations pour améliorer leurs conditions de vie », a-t-elle déclaré.

Haley Bathern, une jeune Aṉangu d’Australie, enseignante dans une école locale de Filles autochtones, a fait l’éloge de ce dialogue en disant : « Il n’y a pas de meilleur endroit pour promouvoir la mise en œuvre de la RG39, qui servira à maintenir le lien avec nos connaissances ancestrales, à travailler pour la reconnaissance de nos droits, et à bâtir des espaces où les jeunes femmes se sentent acceptées tout en devenant économiquement indépendantes et en parvenant à générer des changements au sein de leurs communautés ».

Participant à l’événement à distance, Leticia Bonifaz, experte du Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDEF), a souligné lors de la réunion qu’« il n’est pas possible d’imaginer un monde qui ne reconnaîtrait pas les usages ancestraux et les visions du monde des communautés et Peuples autochtones ». D’après elle, en ce sens, la Recommandation est un document historique qui a été construit à partir de discussions avec des Femmes autochtones de différentes parties du monde, qui se sont penchées sur des questions fondamentales telles que l’éducation, la santé, le travail et le renforcement du pouvoir économique, le tout avec une approche transversale qui intègre les voix des femmes handicapées, LGBTI+, migrantes ou privées de liberté sans connaître leurs droits. 

D’après Leticia Bonifaz, le plus important sera de diffuser le contenu de la Recommandation et que les États parties, à travers leurs instances gouvernementales, créent des politiques publiques pour générer des changements positifs en ce qui concerne les inégalités et le manque d’accès à la justice.

Beatrice Duncan, conseillère en matière d’état de droit et personne-ressource sur les questions autochtones à ONU Femmes, a expliqué que suivant l’adoption de la RG39, tous les États membres doivent soumettre un rapport dans les quatre ans pour que le comité examine la portée de la recommandation dans le quotidien des Femmes autochtones. 

Ces rapports devront inclure la description des mesures adoptées, et le Comité pourra exiger des renseignements supplémentaires tant qu’il le jugera nécessaire afin de savoir comment les droits garantis dans la Recommandation sont respectés, ainsi que pour connaître les stratégies de collaboration avec les organisations de Femmes autochtones mises en place au niveau national.

Mariam Bouraima, de la communauté peule du Bénin et membre de l’Organisation africaine des Femmes autochtones (OAFA), a réaffirmé que « les États membres doivent prendre des mesures pour mettre fin aux discriminations et, à travers l’application de la RG39, impliquer les femmes dans les espaces décisionnels. Elles doivent participer directement à la vie politique de leurs communautés pour prévenir et éradiquer les violences. »

Parlant des possibilités de collaboration entre la Fondation Ford et les mouvements de Femmes autochtones pour promouvoir la mise en œuvre de la Recommandation, Mónica Alemán, directrice du Programme international pour la justice de genre, raciale et ethnique, a souligné qu’afin de mettre en œuvre la RG39, la Fondation Ford « affectera de plus en plus de ressources » aux organisations de Femmes autochtones et à d’autres groupes afin que les réglementations internationales puissent passer des rêves aux réalités locales. « Il est important de lancer et de maintenir un dialogue ouvert et permanent avec le Forum international des Femmes autochtones, de manière à pouvoir identifier de nouveaux partenaires pour l’allocation de ressources financières. »

Elle a ajouté que « l’une des décisions que nous avons prises est celle de soutenir politiquement les mouvements de Femmes autochtones que nous soutenons financièrement ». Cela ouvre aux organisations qui reçoivent déjà un soutien de la fondation une belle occasion de co-participer activement aux processus de dialogue et de déterminer quelle direction prendre avec leurs partenaires ou autres bailleurs de fonds. 

Pour sa part, Erika Unnis, du Forum des femmes Saami, a souligné que malgré la prolifération d’engagements internationaux antérieurs visant à protéger les droits des Peuples autochtones en général, et des Femmes autochtones en particulier, il reste encore des vides réglementaires qui rendent difficile pour ces femmes l’accès à la sécurité alimentaire, aux ressources naturelles de leurs communautés et à leurs identités culturelles, ce qui se manifeste par une dépossession systématique de leurs langues, terres, territoires et ressources naturelles. Cependant, la RG39 représente « un nouveau point de départ pour que toutes les femmes qui se battent pour la défense de ces droits, qu’elles vivent dans des espaces ruraux ou non ruraux, soient au fait des ressources juridiques et administratives dont elles disposent ».

D’après Eleanor Dictaan-Bang-oa, femme Kankanaey Igorot des Philippines, du Réseau des Femmes autochtones d’Asie (AIWN), la Recommandation apporte d’importantes réflexions sur l’égalité et la non-discrimination, avec une approche intersectionnelle aux formes de discrimination. « En tant que Filles et Femmes autochtones, nous subissons des formes de violences croisées qui sont intégrées dans les structures des États colonisateurs, affectant systématiquement notre capacité d’exercer nos droits individuels et collectifs », a-t-elle souligné.

Patricia Torres Sandoval, leader Purhépecha du Mexique et fondatrice de la Coordonnatrice nationale des Femmes autochtones (CONAMI-Mexico), a insisté que pour assurer une mise en œuvre efficace et effective de la Recommandation, « une volonté politique et une allocation adéquate de ressources de la part des États et de la communauté de bailleurs de fonds sont particulièrement cruciales pour la construction collaborative de programmes et de politiques répondant aux besoins des Filles et des Femmes autochtones du monde entier ».

Nadine Gasman, présidente de l’Institut national de la femme (INMUJERES), a reconnu que le plus grand défi des différents gouvernements sera de garantir l’accessibilité de la RG39 dans les langues des peuples afin de la faire connaître au sein des communautés pour que plus de femmes puissent s’approprier de cet outil de protection des droits, et ce dès l’enfance.

« L’appropriation institutionnelle de la recommandation à tous les niveaux – fédéral, local, municipal et étatique – est un élément clé pour parvenir à son application effective. Depuis INMUJERES, nous allons soutenir cet effort pour continuer à assurer la pleine participation des Femmes et des Filles autochtones comme protagonistes, tant au sein de leurs communautés qu’à l’extérieur ». 

Enfin, Gladys Acosta, ancienne présidente du Comité de la CEDEF, a souligné que ce dialogue stratégique démontrait l’énorme potentiel de la recommandation en soi, en précisant que « les États membres auront la plus grande part de responsabilité pour diffuser la RG39 dans toutes les langues et à travers tous les canaux ». De plus, elle a déclaré que l’adoption de cet instrument international devait se faire de manière collaborative et coordonnée par les organisations de femmes, les institutions et les acteurs politiques clés ».